Au cours de sa visite pastorale à Milan, le pape a rencontré le 25 mars 2017, les prêtres et les religieux de l’Église milanaise. Il a notamment répondu à une question sur le rôle des diacres dans l’Église et sur le témoignage de la vie consacrée dans un contexte où elle est minoritaire.
« Vous les diacres vous avez beaucoup à donner, beaucoup à donner. Pensons à la valeur du discernement. Au sein du presbyterium, vous pouvez être une voix qui fait autorité pour montrer la tension qui existe entre devoir et vouloir, les tensions que l’on vit à l’intérieur de la vie familiale – vous avez une belle-mère, pour citer un exemple ! -. Ainsi que les bénédictions que l’on vit à l’intérieur de la vie familiale. Mais nous devons faire attention à ne pas voir les diacres comme des demi-prêtres et des demi-laïcs. C’est un danger.
À la fin, ils ne sont ni d’un côté, ni de l’autre. Non, on ne doit pas faire cela, c’est dangereux. Les regarder ainsi nous fait du mal et leur fait du mal. Cette manière de les considérer enlève de la force au charisme propre au diaconat. Je veux revenir sur cela : le charisme propre au diaconat. Et ce charisme est présent dans la vie de l’Église. Et l’image du diacre comme une sorte d’intermédiaire entre les fidèles et les pasteurs ne va pas bien non plus. Ni à mi-chemin entre les prêtres et les laïcs, ni à mi-chemin entre les pasteurs et les fidèles. Et il existe deux tentations. Il y a le danger du cléricalisme : le diacre qui est trop clérical. Non, non, cela ne va pas. Quelquefois je vois certaines personnes quand elles assistent à la liturgie : elles semblent presque vouloir prendre la place du prêtre. Le cléricalisme, gardez-vous du cléricalisme. Et l’autre tentation, le fonctionnalisme : c’est un assistant qui aide le prêtre pour cela ou pour ceci… ; c’est un jeune homme pour exercer certaines tâches et pas pour d’autres choses… Non. Vous avez un charisme clair dans l’Église et vous devez le construire.
Le diaconat est une vocation spécifique, une vocation familiale qui rappelle le service. J’aime beaucoup quand [dans les Actes des apôtres] les premiers chrétiens hellénistes sont allés voir les apôtres pour se plaindre, parce que leurs veuves et leurs orphelins n’étaient pas bien assistés, et ils ont eu cette réunion, ce « synode » entre les apôtres et les disciples, et ils ont « inventé » les diacres pour servir. Et cela est très intéressant également pour nous, les évêques, parce qu’ils étaient tous évêques, ceux qui ont « fait » les diacres. Et qu’est-ce que cela nous dit ? Que les diacres doivent être les serviteurs. Ensuite ils ont compris que, dans ce cas, c’était pour assister les veuves et les orphelins ; mais servir. Et pour nous évêques : la prière et l’annonce de la Parole ; et cela nous fait voir quel est le charisme le plus important d’un évêque : prier. Quelle est la tâche d’un évêque, la première tâche ? La prière. La deuxième tâche : annoncer la Parole. Mais on voit bien la différence. Et vous [les diacres] : le service. Ce mot est la clé pour comprendre votre charisme. Le charisme comme un des dons caractéristiques du peuple de Dieu. Le diacre est – pour ainsi dire – le gardien du service de l’Église. Chaque parole doit être bien mesurée.
Vous êtes les gardiens du service dans l’Église : le service de la Parole, le service de l’autel, le service des pauvres. Et votre mission, la mission du diacre, et sa contribution consistent en cela : à nous rappeler à tous que la foi, dans ses diverses expressions – la liturgie communautaire, la prière personnelle, les diverses formes de charité – et dans ses divers états de vie – laïque, cléricale, familiale – possède une dimension essentielle de service. Le service de Dieu et des frères. Et combien de route y a-t-il à parcourir dans ce sens ! Vous êtes les gardiens du service dans l’Église.
C’est en cela que consiste la valeur des charismes dans l’Église, qui sont un souvenir et un don pour aider tout le peuple de Dieu à ne pas perdre la perspective et les richesses de l’action de Dieu. Vous n’êtes pas à moitié prêtres et à moitié laïcs – cela reviendrait à « fonctionnaliser » le diaconat –, vous êtes le sacrement du service à Dieu et aux frères. Et de ce mot « service » dérive tout le développement de votre travail, de votre vocation, de votre présence dans l’Église. Une vocation qui, comme toutes les vocations, n’est pas seulement individuelle, mais vécue à l’intérieur de la famille et avec la famille ; à l’intérieur du peuple de Dieu et avec le peuple de Dieu.
En synthèse :
– il n’y a pas de service à l’autel, il n’y a pas de liturgie qui ne s’ouvre au service des pauvres, et il n’y a pas de service des pauvres qui ne conduise à la liturgie ;
– il n’y a pas de vocation ecclésiale qui ne soit familiale.
Cela nous aide à réévaluer le diaconat comme vocation ecclésiale.
Enfin, il semble aujourd’hui que tout doit « nous servir », comme si tout était finalisé à l’individu : la prière « me sert », la communauté « me sert », la charité « me sert ». C’est un élément de notre culture. Vous êtes le don que l’Esprit nous fait pour voir que la bonne route aille dans le sens contraire : dans la prière je sers, dans la communauté je sers, avec la solidarité je sers Dieu et mon prochain. Et que Dieu vous donne la grâce de grandir dans ce charisme de conserver le service dans l’Église. Merci pour ce que vous faites. »
Source: La Croix